Place des Fêtes, une agora parisienne singulière

Située à l’extrême est du XIXe arrondissement, cette place parisienne est l’un des derniers bastions cosmopolites de la capitale.

Place des Fêtes, une agora parisienne singulière

Immenses tours sortant de terre, anneau circulaire rappelant un mini périph, urbanisme et rapports d’échelle hasardeux : sous le ciel hésitant de la fin août, la Place des Fêtes se dévoile.
Quartier où diversité sociale et éthnique font la fierté des habitants, l’ancien cœur du village de Belleville est un lieu ambivalent, singulier.
Ici, les bains douches cohabitent avec les enseignes bio. Loin de l’inéluctable gentrification rapide, on assiste plutôt à une timide reconquête urbaine.
Les échafaudages de travaux se multiplient et se mélangent aux tréteaux du mythique marché de la place.
En effet, des initiatives ont fleuri ces dernières années pour tenter d’adoucir l’océan de béton : jardins collectifs, îlots verts, fresques amateurs.
Quelques rares cafés-restaurants à l’allure bobo ont aussi fait le pari de s’installer. La trattoria “La Brigata”, devanture vert d’eau et terrasse végétale, côtoie des commerces plus défraîchis comme la “Casa des Marques”, magasin de vêtements bon marché.

Amphithéâtre bétonné, la place prend des allures de scène ouverte, offrant une vue imprenable sur une fascinante agora parisienne.
Des petits groupes sont formés, ça et là, en réunion. Entourées par leurs caddies, quatre sexagenaires d’origine maghrébine parlent avec entrain, façon chef de clan, entre des grands piliers d’acier.
Au détour de la rue Louise Thuliez, la carcasse calcinée de l’emblématique bar-tabac “Le Village des Fêtes”, victime des violences des émeutes de juin dernier, se dresse.

Moments de complicité

Plus loin, au milieu du square Monseigneur-Maillet, on retrouve aussi des caddies, mais ceux-là débordent de bouquins. Sur des nattes colorées sont disposés des dizaines d’ouvrages jeunesse. Deux jeunes garçons coiffés d’une kippa sont confortablement assis sur de chaises de camping miniatures, plongés dans leur lecture. A côté, une petite princesse en robe rose déambule au milieu des bandes dessinées.
Il s’agit de l’opération “Bibliothèque Hors les Murs”, organisée par la bibliothèque Dreyfus-Weill et la future médiathèque James Baldwin, qui sera inaugurée dans le quartier au printemps 2024 conjointement à la Maison des Réfugiés.
Enfants et parents partagent “un moment de complicité”, selon Christine NGuyen-Fau, directrice de la bibliothèque Dreyfus-Weill.
L’objectif : “sensibiliser à la lecture et attirer un autre public qui ne se déplace pas en médiathèque, soit parce qu’ils n’osent pas rentrer, soit parce qu’ils pensent que c’est payant, ou enfin que ce n’est pas pour eux”.

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Nous revenons au centre de la place, où trône le cabanon CAPLA, emblème citoyen d’un quartier revendiquant sa mixité sociale.
Pensé comme un “petit équipement pop-up modulable” mis à disposition des riverains et des associations locales, il accueille de nombreuses animations favorisant le lien social : permanences psychologiques, soutien scolaire ou aide numérique, guignette festive.

Nous terminons notre balade au son des roulis des trottinettes et des vélos. La dalle est un véritable ravissement pour les bambins !
Il plane résolument comme un air de fin d’été sur la place des Fêtes.

Reportage réalisé par Camille Principiano